Clou de fondation
©Alban Gilbert
Clou de fondation
©Alban Gilbert
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Clou de fondation

Tello, (ancienne Girsu, Iraq) fin du XXIIe siècle avant J.- C.

Ce cône d’argile crue, malgré sa fragilité et sa taille modeste, porte le message en caractères cunéiformes, déroulé autour de la pointe, adressé par le souverain à la divinité tutélaire. Il s’agit d’un clou de fondation commémorant la construction, vers 2120 av. notre ère, du temple de Ningirsou, dieu de l’État sumérien de Lagash par le prince Goudéa (régnant de 2141-2122 av. J.-C.). Ce clou a été découvert sur le site de Tello, largement fouillé par les français, dont les nombreuses œuvres transférées à Paris ont contribuées à la création du département des antiquités orientales du musée du Louvre au XIXe siècle.

Détails

Fiche technique de l'oeuvre
Artiste Tello, (ancienne Girsu, Iraq) fin du XXIIe siècle avant J.- C.
Titre Clou de fondation
Date Fin du XXIIe siècle avant J.- C.
Domaine Archéologie
Technique Terre cuite
Dimensions H. 0.13 m - diam. 0.06 m -
Numéro d'inventaire 2000.1.1633
Sujet / Thème Archéologie

Un objet rituel

Bâtis pour la majeure partie d’entre eux en terre cuite, les temples mésopotamiens devaient régulièrement être entretenus, voire reconstruits. Ce devoir était réservé au souverain chargé de préserver le temple afin de satisfaire la divinité à laquelle il était dédié. Des inscriptions de fondation portant un texte commémoratif et une dédicace au dieu tutélaire étaient enfouies dans les murs et sous les portes afin de conserver la mémoire du prince bâtisseur.

A travers la puissance du dieu, c’est celle du souverain qui est exprimée par les portraits et inscriptions. Avec la construction du temple dieu poliade Ningirsou, le prince Goudéa a réuni le plus grand nombre d’inscriptions épigraphiques jamais connu jusque-là en Mésopotamie. Ces témoignages de fondation furent enterrés sous les portes ou incorporés dans les murs. Leur forme varie : cônes, clous, briques d’argile, tablettes de pierre ou de métal, pointes surmontées de tablettes avec une figurine.

Les rituels de fondation qui fichent des clous délimitent ainsi l’espace sacré, ménageant à la divinité un lieu à l’abri des démons et des forces malignes des mondes souterrains, offrant un lieu empreint d’une présence bénéfique.

L’inscription gravée sur ce clou nomme le temple et dédie celui-ci au dieu, Ningirsou :

« Pour le dieu Ningirsou, le héros puissant du dieu Enlil, son roi, Goudéa, prince de Lagash, sa maison (nommée) Eninnou, « l’oiseau tonnerre resplendissant ».

Cette inscription délivre et préserve le témoignage de la construction mais aussi le nom du prince bâtisseur. Le nom du temple, Enninou, se traduit « maison 50 », le chiffre symbolique du dieu suprême du panthéon sumérien Enlil, père de Ningirsou, auquel ce dernier est assimilé. L’épithète « oiseau-tonnerre resplendissant », emblème de l’État de Lagash, renvoie à la forme originelle du dieu Ningirsou, un oiseau léontocéphale : un aigle blanc, rugissant à tête de lion et aux ailes déployées symbolisant le nuage d’orage.

Les nombreuses inscriptions royales rapportent sensiblement le même mécanisme attaché à la fondation d’un temple. La construction d’un temple passe par l’autorité divine exprimée par sa plus haute hiérarchie, Enlil dont la volonté est transmise à l’humain Goudéa, le prince de l’État de Lagash, par un dieu Poliade Ningirsu. Enlil valide, Ningirsu ordonne et Goudea obéit.

Goudea, médiateur entre le monde terrestre et le monde divin

L’apparition des premières villes mésopotamiennes au cours de la seconde moitié du IVe siècle avant J.-C. marque le début de l’ère des cités-états déjà amorcée par la sédentarisation et la maîtrise de l’agriculture. Les grandes innovations, telles l’architecture et l’écriture, participent à l’essor du pouvoir royal et au développement de l’art sumérien. Chaque ville devient le siège d’un pouvoir exprimé par un roi-dieu largement représenté à travers des statues ou bas-reliefs.

Le IIIe millénaire connaît un développement des cités-états qui se partagent le sud de la Mésopotamie (au sud de l’actuel Irak) répondant à une organisation précise : un centre urbain entouré de son espace agricole dirigé par un souverain représentant la divinité poliade au sein des hommes.

La fin du XXIIe siècle avant notre ère marque l’achèvement d’une période obscure pour le pays de Sumer après la chute de l’Empire Akkad avec l’indépendance de L’État de Lagash.

Le prince du royaume, Goudéa, soucieux comme de nombreux souverains de satisfaire les dieux, d’obtenir la reconnaissance divine et de se glorifier auprès des hommes, fait édifier un grand nombre de palais, et entreprend un important programme de construction pour restaurer et édifier des temples en l’honneur de toutes les divinités du panthéon. Il fait rebâtir le temple de Eninnou, le temple du Dieu poliade Ningirsou.

A travers les temples que Goudea fait ériger et les portraits sculptés le représentant vénérant les dieux, le souverain souhaite laisser la mémoire d’un prince idéal, architecte, respectueux de la volonté des dieux et du bien-être de ses sujets, médiateur entre le monde  des hommes et le monde des dieux. Ces nombreux témoignages sont largement présents dans les collections orientales du musée du Louvre : sept statues, deux sceaux-cylindres et sept stèles. Goudea, en fidèle médiateur, agit en conformité avec les lois divines, assurant ainsi son peuple de la protection des dieux, gage de prospérité et de fertilité pour son royaume.

Provenance

Collection de Camille Aboussouan, Agen, 2000 ; donation de Camille Aboussouan au musée des Beaux-Arts, Agen, 2000 ; entrée au musée des Beaux-Arts, Agen, 2000

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Localisation

Rez-de-chaussée

Dernière mise à jour : 18 janv. 2021

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